Recherches féministes. Critiques (des) féministes
 Marie-Victoire Louis  *

Interview 2
"La situation des études féministes en France est catastrophique"

Publié sur le site Pénelopes.org
01/12/2001

date de rédaction : 26/10/2001
date de publication : 01/12/2001
mise en ligne : 22/09/2009
Voir et imprimer en PDF via pdf Print FriendlyAugmenter la taille du texteDiminuer la taille du texteRecommander ce texte par mail

La situation des études féministes - que j’entends ici comme recouvrant le pôle enseignements-recherches - est actuellement, en France, catastrophique. Je dirais même honteuse pour l’Université française, honteuse pour la recherche française.

Pour ce faire, Il n’est qu’à pour comparer les catalogues des éditions scientifiques en sciences sociales, les bibliographies, les rayons des Women’s studies dans les librairies scientifiques, la présentation des programmes des Universités dans les pays anglo-saxons, notamment aux Etats-Unis et leurs équivalents - si tant est que le terme puisse être employé - français. Les intitulés mêmes sont particulièrement signifiants : ainsi, dans le catalogue Général « Sciences Humaines » 2001 des Editions l’Harmattan, le terme de classement employé est : « Questions féminines ».

Mais après avoir dit cela, je suis bien obligée de constater que la conception de ce qui relèverait de la « honte » n’est pas également partagée, notamment au ministère de l’Education Nationale (plus précisément à la Direction de l’enseignement supérieur) et au CNRS.   

Depuis une vingtaine d’années - malgré de nombreuses demandes émanant notamment de l’ANEF (Association Nationale des études féministes) - rien n’a été fait par les institutions concernées, l’Université et le CNRS essentiellement.

Ces institutions se sont - au mieux - contentées de gérer les rares et maigres quelques acquis que les féministes avaient obtenu, à la suite du colloque de Toulouse organisé par l’AFFER en 1982 « Femmes, féminisme et recherches ». 3

Plusieurs pôles ont donc soit disparu, soit lentement mais sûrement décliné, faute de soutien, de demande institutionnelle, et plus simplement de respect du travail des chercheuses féministes. Un appauvrissement de la qualité de ces travaux en a donc nécessairement découlé.

Ceux qui, isolés, sans visibilité, subsistent, ne se maintiennent que grâce à la dynamique personnelle de chercheuses qui les portent, souvent fatiguées, à bout de bras, depuis des années.
D’autres enfin ont dû passer sous les fourches caudines des institutions qui ont souvent exercé sur elles - avec un certain succès - de très fortes contraintes pour les normaliser. 4

Quant aux féministes, plusieurs sont celles qui, épuisées, exaspérées, usées par les attitudes, les comportements, les agissements de leurs collègues, de leurs supérieurs hiérarchiques, de l’institution ont quitté l’enseignement ou la recherche, l’ont poursuivi hors de France ou ont dû abandonner leurs ambitions et leurs projets.  

Les revues féministes militantes/engagées des années 1970, 1980  La Revue d’en face, Les Cahiers du Grif, Pénélope, Les Cahiers du Cedref, Les Cahiers du féminisme, Proiets féministes - et la liste n’est pas exhaustive - ont toutes disparu. Seule Nouvelles Questions Féministes paraît encore, irrégulièrement, et n’est plus soutenue par le CNRS . 5

Quelques nouvelles revues sont en revanche apparues, Lunes 6( Réalités, parcours, représentations des femmes) , Clio 7(Histoire, femmes et Sociétés), les Cahiers du Gedisst/du genre8, la revue Travail, genre et Société.9

Au delà de leurs incontestables acquis, aussi professionnelles et de qualité soient-elles, ce n’est pas leur faire injure que de dire que ces revues ont perdu en analyse critique - que les revues évoquées plus haut incarnaient - ce qu’elles ont gagné en visibilité institutionnelle. Par ailleurs, très faible.

Enfin, je sais qu’un bilan de ce qui existe est - bien tardivement - en train d’être fait au Ministère. Mais outre le fait qu’aucun bilan au monde ne vaut engagement - l’inverse est souvent même plus probable - celui-ci ne devrait-il pas s’accompagner, en regard avec ce qui existe dans les pays les plus avancés en la matière d’une présentation des champs entiers de la recherche féministe non traités, laissés en friche ?    

En outre, bien évidemment, les enseignements et recherches féministes ont pâti des attaques - insidieuses ou (très) violentes, en tout cas, incessantes - dont les féministes ont été depuis si longtemps et sont toujours l’objet en France.

Il faut à cet égard insister sur le fait que ces attaques venaient - et viennent toujours - du milieu «scientifique» lui-même et à son plus haut niveau.

Il n’est qu’à prendre - parmi mille autres - pour exemple ce que les chercheuses (notamment Michèle le Doeuff) qui ont, légitimement, voulu obtenir la reconnaissance de leurs travaux et donc de leurs pairs pour devenir directrices de recherches ont pu entendre et lire, les concernant.

L’immense majorité d’entre nous avons dû vivre dans un environnement de guerre d’usure, dénégation, dévalorisation, détournement de nos travaux, pour ne pas évoquer des réalités, pour certaines, beaucoup plus violentes .

Bien sûr et heureusement. Mais la question n’est pas là : des individu-es ne font pas une politique. Tout au plus, peut-on dire que la majorité de ces féministes - de moins en moins nombreuses, de plus en plus âgées et, pour beaucoup déjà, ou proches de la retraite ou déjà à la retraite  - incarnent la permanence de ce qui fut une politique. Incarnée, au début des années 1980, au CNRS par Maurice Godelier .

Ce qui a néanmoins pu être fait - et dont la valeur est très réelle, y compris dans la comparaison avec la production américaine - s’explique, en règle générale par la rencontre ponctuelle entre la ténacité personnelle d’une chercheuse et une personne - un homme le plus souvent - qui situé dans l’institution, l’a laissé agir, ou mieux, l’a soutenue personnellement - et plus rarement - institutionnellement  

Ces heureuses rencontres doivent être appréciées à leur juste valeur, mais ne peuvent, en aucun cas, être considérées comme ayant une valeur d’exemple. Elles représentent en effet une ponctuelle conjonction fondée sur une convergence d’intérêts ; elles ne sont donc pas l’expression d’une politique.   

La relève se fait au compte-gouttes.
Les jeunes doctorant-es travaillant dans le cadre d’un courant de pensée féministe et/ou sur le ‘genre’, ont beaucoup de mal à trouver des directeurs et directrices de recherches ; ceux et celles qu’ils et elles trouvent sont souvent âgé-es ; ne sont le plus souvent pas au courant des débats actuels, faute d’intérêt suffisant concernant les publications anglo-saxonnes, mais surtout, faute, depuis si longtemps, de gratifications - et même de reconnaissance - institutionnelles.

Ils et elles travaillent donc les plus souvent seul-es dans un environnement qui, sauf exceptions, leur est soit hostile, soit indifférent.

L’absence de reconnaissance institutionnelle des recherches féministes n’encourage pas - et c’est un euphémisme - les jeunes à faire des mémoires, des thèses féministes. Les seuls projets qui réussissent le doivent, là encore, à une conjonction rare entre un chercheur/une chercheuse et une logique institutionnelle ponctuelle .
Pour une thèse, une carrière réussie, combien s’épuisent, perdent des années du fait des blocages de l’institution, changent de sujet et abandonnent ?

Certes, quelques rares pôles se sont récemment constitués dans des universités. Mais la question de leur financement - c’est-à-dire de leur autonomie intellectuelle -  doit être posée.  
Les recherches féministes souffrent d’être multi et transdisciplinaires, de ne bénéficier - dans la moins pire des hypothèses - d’aucun appui institutionnel, d’être majoritairement publiées en anglais, et de déranger l’institution et nos collègues.   

Par ailleurs, en sciences humaines, aucun texte féministes majeurs - et des dizaines devraient l’être - n’a été traduit. La pensée féministe française a ainsi été asséchée, faute de pouvoir se ressourcer, faite de se pouvoir se confronter aux débats théoriques qui ont lieu dans le monde.

Mon hypothèse est la suivante : Je pense que la majorité d’entre eux, d’entre elles savent très bien la valeur et l’importance et de nos travaux. Ils et elles savent aussi très bien que les travaux en sciences sociales qui n’abordent pas fondamentalement la question des rapports de sexe sont, au mieux, bancals, au pire, inappropriés.  

Ceci étant dit, la question essentielle n’est pas de savoir s’ils/elles en sont conscients mais d’analyser les manifestations et surtout les résultats de ces blocages.

Et là, nous sommes bien contraintes de constater qu’ils et elles mettent souvent une réelle énergie à nous disqualifier, à ne pas nous lire, à ne jamais nous citer, à globalement nous ignorer.

Les stratégie de chacune pour faire face et vivre dans cet environnement sont bien sûr diverses.

Comment peut-on tenter d’expliquer cela ?
S’ils et elles nous reconnaissaient - individuellement mais surtout globalement - comme nous inscrivant dans un courant de pensée (en histoire, en sociologie, en sciences politiques, en anthropologie, en psychologie …mais aussi dans les sciences dites « dures » ), qui plus est critique , en tant que chercheuses qualifiées - participant, comme eux, à la production scientifique - ils devraient, par là même, reconnaître l’importance incontournable de ce qui fonde nos recherches, à savoir l’analyse des relations entre les sexes.
À laquelle ils n’ont, eux, dans la quasi-totalité des cas pas procédé.
Et lorsqu’ils l’ont fait, le résultat n’était pas nécessairement probant.

Ils devraient alors reconnaître les failles - souvent gigantesques - de leurs propres travaux.
Ils devraient enfin s’interroger sur les raisons - notamment dues à leur propre ancrage intellectuel au sein de la pensée (française) de la domination masculine - qui expliquent qu’ils n’aient pas reconnu ces recherches.
Il est, à cet égard, particulièrement significatif - en termes d’analyse concrète de rapport de pouvoirs - que lorsque nos collègues se réfèrent néanmoins aux travaux féministes, c’est dans la quasi totalité des cas, aux américaines qu’ils se réfèrent.
Pratiquement jamais aux françaises .

Nous reconnaître comme simplement « égales» seraient donc reconnaître la fin du modèle masculin dominant en sciences humaines.
Nous ne pouvons donc être qu’isolées, différentes, singulières. C’est ainsi qu’ils protègent leur pré-carré en laissant à la marge celles qui, pourraient les déstabiliser, tentant de gérer individuellement le problème avec chacune d’entre elles.

Il faut cependant - pour que cette analyse soit juste - dire que notre indépendance de pensée peut être aussi reconnue et garantie dans des laboratoires qui ne sont pas féministes et ou qui ne travaillent pas sur ses sujets.

Quoi qu’il en soit, nos collègues se sentent souvent - pour ceux qui peuvent aborder de manière critique leurs pratiques et leurs recherches - soit fautifs, soit coupables. Et toujours mal à l’aise. Ce qui est la pire des situations pour traiter d’un problème.

On comprend alors peut être mieux les raisons qui expliqueraient pourquoi - sauf à enfermer les féministes dans un ghetto institutionnel qu’elles refusent - il est si difficile à l’institution de penser une politique d’impulsion des recherches féministes.  

Il y a heureusement peut être un aspect positif à cette incontestable réalité de la légitimité de l’institutionnalisation de l’anti-féminisme en France, à savoir, en réaction, notre capacité à ‘produire ‘ de grand-es féministes. Je pense particulièrement parmi les moins connus à Léon Richer et Madeleine Pelletier.
Et si, comme je le pense la France est le pays qui a le mieux conceptualisé le patriarcat - dont les monuments sont les Codes Napoléoniens - il est alors historiquement compréhensible que la France produise une pensée critique à la mesure de cet héritage.

Pour moi, l’apport des féministes françaises (mais aussi belges) des années 70, 80 est énorme. Les féministes de ma génération ont beaucoup apporté à la pensée, à la critique, à l’évolution de la société.
Mais force est de reconnaître qu’il n’est en aucun cas reconnu à sa juste valeur.
Il a même été quasi totalement refoulé, sans doute justement du fait de sa richesse et de ses immenses apports.
Il me semble, à cet égard, que si nous en étions plus fières, nous serions plus respectées. Et, avec nous, les femmes le seront, elles aussi.
En tout cas, sans ce respect que nous devons exiger pour nous mêmes, les femmes ne pourront pas l'être.

Ceci étant dit, et après avoir précisé sans aucune ambiguïté que je ne situe pas au même niveau d’analyse et donc de responsabilité, les institutions qui prennent les décisions politiques et les féministes qui les subissent et auxquelles elles doivent s’adapter - il me paraît important d’évoquer la responsabilité des féministes elles-mêmes dans ce processus de délégitimation de la recherche féministe.

Beaucoup d’entre elles, beaucoup d’entre nous, ne se sont pas opposées aux attaques anti-féministes - pourtant souvent si grossières - et ont fait « le dos rond ». Elles, nous, les avons même cautionnées, soit formellement, soit par un silence complice, soit par mise en œuvre d’une logique de l’esquive. La mise en œuvre de solidarités à l’égard de celles qui les subissaient de plein fouet a été quasi nulle.

Par ailleurs, les enseignantes / chercheuses qui bénéficiaient de postes, de statut, de légitimité, de reconnaissance intellectuelle ne se sont pas toujours donné les moyens institutionnels de créer les conditions de la perpétuation de leur propre réussite.

Enfin, ces recherches, ces enseignements se sont souvent progressivement, insidieusement, coupées de la connaissance réelle de la vie des femmes, pour des raisons de classe sociale, de génération et de rupture avec le militantisme des chercheuses qui les incarnaient.  

J’y vois là - dans ce dernier point surtout - l’une des raisons majeures d’un réel éloignement par rapport aux questions actuelles qui se posent aux femmes en France et dans le monde.

Globalement ces recherches se sont grosso modo adaptées à la « demande sociale » c’est à dire à la demande politique et ont perdu en subversivité, donc en liberté et en idées.  

L’intégration de plusieurs chercheuses dans les appareils d’état ont, par ailleurs, accéléré ce processus d’étatisation de la recherche. 10 Mais pour autant, peu nombreuses sont les recherches qui sont à même de participer, de suivre, de comprendre, d’interpeller les politiques mises en œuvre par les institutions, onusiennes, européennes, nationales qui gèrent au quotidien la question, si politique, des rapports entre les sexes.

Enfin, nombre de ces recherches, si souvent été ‘émasculées’ par les refoulements, les auto-censures, les réécritures, les aimables pressions, les concessions qui tuent les textes plus efficacement qu'une censure sans appel - émanant des financeurs, des éditeurs, des médias, des pouvoirs publics - sont souvent devenues peu, voire pas, lisibles.  

A cet égard, la comparaison entre ces recherches et le foisonnement d’idées, d’informations, de questionnements que l’on peut lire sur le site des Pénélopes et sur le forum des Chiennes de Garde - pour ne pas parler des sites américains lisibles sur internet - est particulièrement signifiant.

D’abord, il a fallu que je sois embauchée par le CNRS. Beaucoup d’autres que moi auraient pu l’être : j’étais, tout simplement, là où il fallait être, au bon moment. Je dois aussi préciser - pour être juste - que mon insertion au CNRS a été soutenue par Jacques Delors.

Aussi, j’ai toujours eu une conscience très vive de l’incroyable chance qui fut la mienne de pouvoir y consacrer à la recherche féministe une partie de ma vie.

Et parce que j’ai été très marquée par l’incroyable événement que représenta le colloque de Toulouse de 1982 - où nous nous sommes retrouvées des centaines de femmes autour du projet de construire et de participer à des recherches féministes - , je n’ai jamais oublié que mon travail n’a pu avoir lieu que parce que des centaines, des milliers de femmes - et dans une bien moindre mesure, d’hommes - ont, elles et eux, dû abandonné leurs projets.
Un temps, j’employais même, me concernant, l’expression d’ «avoir le sentiment de travailler sur un champs de cadavres » .

Ensuite, j’ai pu faire les recherches que je souhaitais faire parce que je crois avoir vite compris qu’aucun appel d’offres ne concernerait mes recherches, encore moins n’accepterait la manière dont je voulais les aborder et les méthodes que je voulais employer. Ceux-ci sont en outre généralement tellement politiques que la réponse est souvent induite dans la question.
Dès lors, j’ai pris très vite la décision d’auto-financer mes recherches, en utilisant pour les frais nécessaires, mon salaire.

J’ai, par ailleurs, découvert mais plus tard - et avec plus de difficultés, d’angoisses et de ruptures - qu’il est très difficile à un laboratoire de faire une place à une personne qui veut faire des recherches de manière autonome.
Je me souviens d’une réaction - dite selon mes souvenirs sur un ton critique / amusé / amical  - de J. Delors qui fut mon premier « patron » :« Marie-Victoire, quand comprendrez-vous que la recherche n’est pas encore une activité libérale ? ».
Elle l’était d’ailleurs d’autant moins que je touchais un salaire sur fonds publics.  

J’ai enfin aussi vite compris que mon indépendance ne pouvait aller de pair être avec la demande de « faire carrière » au CNRS. Mais je dois aussitôt préciser que ce choix - de ne pas demander devenir directrice de recherches - ne m’a, en rien, coûté.
Au contraire, ce qui m’aurait coûté, c’eût été d’avoir à demander une reconnaissance de mes travaux à des pairs qui ne connaissaient pas mon champ de recherches, mais surtout qui y sont souvent - a priori - hostiles.
Un seul exemple, la dernière évaluation du CNRS me concernant fait état de mes «différents travaux empiriques » et me suggère, sans cependant excès d’autoritarisme - de « redéfinir (mes activités) - en termes de défense d’une cause ». 11
Cette appréciation qui récuse, avec mépris, toute dimension théorique à mes recherches ne signifie-t-elle pas aussi que la question de la « scientificité » de mes recherches est, pour le CNRS, sujette à caution ?

Je savais donc très bien que cette reconnaissance par mes pairs me serait refusée.
Je me refusais enfin de subir la moindre humiliation.

Si je me suis permise d’évoquer mon cas personnel, c’est qu’il me semble - qu’avec d’autres - il peut peut-être permettre de réfléchir de manière plus nuancée à la problématique - qui, par ailleurs, n’en est pas une, car elle se contente d’opérer un constat - de l’existence d’un «plafond de verre» qui empêcherait les femmes d’accéder aux sphères de pouvoirs.

Le pouvoir intègre ceux et celles qu’il peut et veut intégrer ; et le partager signifie aussi adhérer à ses valeurs, à ses normes, à ses pratiques.  

Qu’il y ait plus de femmes dans les sphères de pouvoirs signifie aussi - si on se limite à ce seul projet - qu’il y ait moins de femmes qui le conteste.

Ces expressions se rattachent à des courants d’analyses politiques différents.
Employer, en effet, l’expression de ‘genre’ - comme de ‘rapports sociaux de sexes’ d’ailleurs - surtout si, comme c’est le cas, elles tendent à devenir hégémoniques - n’implique pas nécessairement que soit abordée la question des rapports de pouvoir entre les sexes.
Certes, elle peut l’être et l’est souvent, mais elle ne lui est pas consubstantielle.
Un seul exemple : des chercheurs/des chercheuses travaillant dans le cadre de l’analyse de ‘genre’ et/ou de ‘rapports sociaux de sexes’ peuvent défendre - en s’inscrivant dans ce champ - des positions légitimant le système prostitutionnel.   

En revanche, s’inscrire dans le cadre d’études féministes, c’est reconnaître que nous vivons dans une société patriarcale et que la recherche, l’enseignement a pour fonction, pour finalité d’en analyser les modalités d’expressions, les logiques de reproduction, les permanences et les ruptures.
Mieux comprendre notre monde, pour mieux le changer.

En tout état de cause - alors que, sans conteste, c’est le champ des « études féministes » qui est actuellement le plus menacé - il serait dramatique que la tension intellectuelle et politique entre ces problématiques ne se perpétue pas.

26 octobre 2001

Retour en haut de page
Notes de bas de page
1 
2 Interview réalisé par Laure Poinsot.
3 Cf, Marie-Victoire Louis, Recherches sur les femmes, recherches féministes. In : L’état des sciences sociales en France, sous la direction de Marc Guillaume. Éditions La découverte. 1986. P. 457 à 462.  
4Ajout. 14 Mars 2003. Les chercheur-seuses des laboratoires CNRS trouveront ces critiques injustes, sans doute, partiellement, à juste titre. J'aimerais qu'ils/elles critiquent mon appréciation.
5 Ajout. 14 mars 2003. NQF est dorénavant publié par l'Université de Lausanne. Suisse. http://www.unil.ch/liege/nqf
6 Lunes. 16 rue de la petite cité . 27000 Evreux. Tel/fax : 02 32 30 60 23. Publié avec le concours du Centre National du Livre.
7 Clio. Presses Universitaires de Toulouse - Le - Mirail, 5 allée Antonio Machado. 31058 Toulouse cedex 1.  Publié avec le concours du Centre national du Livre.
8 Cahiers du Gedisst/du genre, Editions l’Harmattan, 22 bis rue des Ecoles. 75005 Paris.
9 Travail, genre et société. (Souligné) Éditions l’Harmattan. Ibid.
10 Faut-il rappeler, à cet égard, que la Secrétaire d’état, Madame Nicole Pery, déclarait récemment lors des Assises contre les violences qu'elle avait organisées à la Sorbonne quelle n’avait "pas la prétention qu'elles bouleversent des rapports de force millénaires".
11 Ajout en date du 14 mars. J'ai cependant officiellement contesté comme étant "scandaleuse" cette appréciation en Février 2003.
12 Cf., Le texte ultérieurement écrit : « Dis-moi, le genre, ça veut dire quoi ? » . 23 mai 2005.

Retour en haut de page