Simone de Beauvoir
 Marie-Victoire Louis

Simone de Beauvoir : impressions

date de rédaction : 01/05/2000
mise en ligne : 02/05/2006
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Mai 2000

Malheureusement1, en ce qui me concerne, je n’ai pas eu le temps de relire récemment Le Deuxième Sexe.

Quelques petites choses éparses.

- Ce qui m’a incontestablement le plus marquée, c’est le fait que l’on puisse vivre une relation de couple avec un homme et ne pas partager le même espace physique. À l’époque, quand son mode de vie a été connu, je n’étais pas encore féministe, mais je me souviens très bien avoir trouvé cela vraiment formidable. Et après mon divorce, c’est effectivement ainsi que j’ai vécu.

- J’ai été – et je le suis encore – très impressionnée et très admirative – par la quantité de travail qu’elle a fournie pour écrire Le Deuxième sexe.2

- La phrase publiée au terme de je ne sais plus quel livre - et que je cite de mémoire - « J’ai été flouée » - m’est apparue, à l’époque, comme une remise en cause de tous ses engagements. Et je ne comprenais pas pourquoi tous ceux et celles qui étaient proches d’elle ne s’étaient pas précipité pour lui demander ce qu’elle entendait par là. Je pensais alors que nous – celles et ceux qui avaient été « marqués » par elle – étions en droit d’avoir les éléments d’informations qui nous auraient permis d’apprécier la teneur de ce jugement.

- Je me souviens d’elle – c’est la seule fois où je l’ai rencontrée – lors du colloque sur le harcèlement sexuel, organisé en 1985 avec le soutien du Ministère des droits des femmes. Elle était, alors, très pitoyable, disait nombre de banalités bien peu ‘féministes’ et j’avais trouvé qu’elle était instrumentalisée de manière fort triste.

- Lorsque j’ai lu le livre de Bianca Lamblin: « Mémoires d’une jeune fille dérangée » – livre qui m’a bouleversée –, j’ai eu, pour employer un euphémisme, un sentiment de très profond malaise à son égard.

Voilà, c’est tout3.

www.penelopes.org/archives/pages/sdb/Point/MVL.htm

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Notes de bas de page

1  Ajout. Mai 2009. Concernant le contexte dans lequel ce petit texte a été écrit, le voici, tel que mes souvenirs me permettent de me le remémorer. Les Pénélopes avaient constitué un important dossier concernant Simone de Beauvoir. Ses responsables m’avaient demandé un texte; n’ayant pas travaillé sur le sujet, je n’avais rien à en dire. Elles ont un peu insisté : j’ai alors écrit ce petit texte. Et si je publie aujourd’hui ce texte, malgré son faible intérêt, c’est parce que je l’ai trouvé sur internet sous mon nom, et que, dans la mesure où j’ai souhaité que ce site soit exhaustif (en ce qui concerne les textes publics), je devais l’y insérer.

2  Ajout. Mai 2009. Aujourd’hui, bien évidemment, je n’écrirai plus la même chose. À chaque nouvelle lecture de tel ou tel chapitre de ce livre – dont l’ambition fut sans doute et légitimement la cause première de son impact – j’en vois mieux les ‘à peu près’, le manque de rigueur, la superficialité de tant de ses jugements, la faiblesse de ses références et de ses notes, sa capacité à écrire aisément sur ce que d’autres connaissaient bien mieux qu’elle, sa méconnaissance de la pensée et de l’histoire féministe. Sans évoquer tant de manifestations de son aliénation envers les hommes et son anti-féminisme (celui concernant les Américaines étant, peut être, le plus grossier) si souvent, assez lamentable.
À cet égard, si j’ai, avec Marie-Jo Bonnet, dénoncé la censure dont nous avons été l’objet dans le livre coordonné par Ingrid Galster, Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe. Le livre fondateur du féminisme moderne en situation. Honoré Champion Editeur. 2004. 519 p., je pense toujours que le projet que son livre s’assignait fut, méthodologiquement, le plus intéressant de tous ceux publiés concernant ce livre. Et il n’est pas inutile de rappeler que le constat, au terme de ce colloque, fut, quant à son apport à la pensée et à la méthode, assez catastrophique.
Dernier point : Le déluge d’écrits à l’occasion de l’anniversaire du cinquantenaire du Deuxième sexe, avait, pour moi, pour fonction politique essentielle de contribuer à figer le féminisme d’aujourd’hui à sa propre analyse. Et, comme elle-même avait nié les féministes qui l’avait précédée, de nier celles qui avaient été postérieure à elle.
Cette analyse politique n’étant pas – est-il nécessaire de l’expliciter ? – un jugement de valeur concernant aucun des livres, des textes publiés à cette occasion.

3  Ajout. 31 décembre 2010 : Cf. Marie-Victoire Louis, « Prostituées et hétaïres » Pour une analyse critique du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir (2005).


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